Définition générale
Dans sa définition générale d'attribution de l'esprit à tout ce qui existe, le panpsychisme peut recouvrir des positions différentes, voire incompatibles entre elles, selon la conception que l'on se fait de ce qui existe vraiment ou de ce qu'est l'esprit2.
Ceux parmi les partisans du panpsychisme qui admettent, par exemple, l'existence d'entités fondamentales telles que les électrons ou les photons accordent un certain esprit – ou proto-esprit – à ces particules physiques élémentaires. A contrario, ceux parmi eux qui rejettent l'idée qu'il existe vraiment des choses comme les forêts, les amas d'étoiles ou les sociétés humaines – parce qu'il ne s'agirait là que de constructions conceptuelles formées à partir de certains éléments comme les arbres, les étoiles ou les êtres humains – refusent d'attribuer un esprit à ces systèmes complexes.
De plus, la question se pose dans le cadre du panpsychisme de savoir exactement ce que l'on entend par esprit, ou par conscience, et il revient aux partisans de cette conception d'élucider le rapport entre l'esprit et l'expérience subjective.
Panpsychisme et microphysique
Dans le contexte de la physique contemporaine, le panpsychisme recouvre deux positions métaphysiques distinctes3 :
- Les particules élémentaires – électrons, quarks, photons, etc. – dont certaines entrent dans la composition des organismes auxquels on attribue une conscience, possèdent à un degré élémentaire ou minimal une dimension psychique qui est constitutive de l'esprit de ces organismes. Thomas Nagel, par exemple, définit le panpsychisme comme « la théorie selon laquelle les constituants physiques ultimes de l'univers ont des propriétés mentales, qu'ils soient ou non des parties d'organismes vivants »4.
- Les éléments fondamentaux de la réalité – qu'il s'agisse de particules, de champs de force ou de tout autre élément physique – sont une forme élémentaire d'esprit ou de conscience. La conscience constitue alors l'essence même de la réalité physique.
La première position attribue la conscience aux entités fondamentales de la nature, ainsi qu'aux organismes constitués de ces entités (mais pas à leurs agrégats) ; la seconde caractérise ces entités comme étant de nature mentale, et c'est toute la réalité physique qui, de fait, est identifiée à la conscience. Cette dernière position est associée à une forme de « mystérianisme », autrement dit, à l'idée que les concepts de la physique (masse, énergie, spin, etc.) ne décrivent pas les propriétés intrinsèques des choses – leur contenu – mais seulement les relations ou la structure dans lesquelles elles sont engagées.
Bien que la forme de conscience qui est ainsi attribuée ou identifiée aux constituants ultimes du monde soit simple et très limitée, elle ne se distingue pas essentiellement de la nôtre. Pour le partisan du panpsychisme, il n'y a pas de différence de nature qui soit radicale entre les différentes formes de conscience ; il existe entre elles essentiellement une différence de degré – parfois très grande.
« Proto-panpsychisme
Si le panpsychisme semble indissociable à première vue de la thèse de l'omniprésence de l'esprit, il est pourtant logiquement possible de soutenir certaines versions ou variantes modérées du panpsychisme selon lesquelles l'esprit proprement dit est un phénomène qui – non seulement n'est pas universel – mais est au contraire relativement rare. Dans ce cas, une distinction sera opérée entre les propriétés spécifiquement mentales – associée à l'expérience subjective des organismes les plus complexes – et les propriétés proto-mentales communes dans la nature. C'est sur la base de ces dernières qu'émergent les propriétés mentales de niveau supérieur2. Cette forme de panpsychisme fait appel à la notion d'émergence pour rendre compte du développement des propriétés proto-mentales en caractéristiques mentales à part entière. Il ne s'agit toutefois pas d'émergence au sens fort du terme puisque les caractéristiques spécifiquement mentales qui émergent ne sont pas de nature différente de celles qualifiées de « proto-mentales ».
Panpsychisme et théories apparentées
Le panpsychisme doit être distingué de certaines croyances ou théories apparemment proches, notamment de l'animisme, de l'hylozoïsme, du panthéisme et du panenthéisme1 :
- L'animisme, au sens le plus courant du terme, est un système de croyances selon lequel tous les êtres naturels possèdent une forme d'intelligence et d'intentionnalité comparables à l'esprit humain. Cette idée est associée aux mythes et aux premières religions. Dans le cadre du paganisme, par exemple, les plantes et les animaux ont une âme, les planètes et les étoiles sont gouvernées par des intelligences, etc.
- L'hylozoïsme est la théorie ou doctrine d'après laquelle tous les êtres de la nature sont plus ou moins vivants, sans nécessairement avoir des sensationsou des expériences. Cette idée remonte à la philosophie de l'Antiquité, période durant laquelle la notion de vie était définie non pas comme une capacité à ressentir subjectivement certaines choses mais plutôt comme une capacité à se mouvoir de façon autonome (principe interne de mouvement chez Aristote par exemple)
- Le panthéisme identifie l'ensemble de la nature à Dieu. La nature y est alors interprétée comme une totalité organisée dont l'unité ne peut être comprise qu'à travers la notion de Dieu. Certains philosophes classés comme panpsychistes considèrent que Dieu signifie l'Univers en son entier (Spinoza, Haeckel), et adhèrent de fait à une forme de panthéisme. Mais le panthéisme ne se prononce pas lui-même sur la nature – mentale ou non – des entités individuelles, à la différence du panpsychisme.
- Le panenthéisme est la position théologique selon laquelle Dieu pénètre ou réside dans chaque chose. Elle est aujourd'hui représentée par le philosophe et théologien Charles Hartshorne. Dieu serait omniprésent, et constituerait l'essence de toute chose. Ainsi comprise, cette essence participe de la nature de Dieu lui-même ; elle ne caractérise donc pas la nature des choses individuellement. Pour cette raison au moins, cette position ne doit pas
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